dimanche 12 juin 2011

Bulletin 39


Vigilance

Info

N° 39 – mars 2011

Bulletin de Justice & Libertés, Comité de vigilance contre l’extrême droite

et pour le respect de l’Etat de Droit

Les trois piliers de la dynastie Le Pen :

les fondamentaux, les mensonges et la peur.

Les fondamentaux déterminent l’essentiel du mouvement d’extrême droite et de tous ceux qui s’y rattachent ou le représentent. Ainsi, pour couper court à toutes les hypothèses extravagantes concernant Marine Le Pen- promue présidente du Front national (FN) dimanche 16 janvier 2011- son père se confiait, fin octobre 2010, aux étudiants du Centre de formation des journalistes (CFJ) : «Sur l’essentiel, Marine a les mêmes idées que moi

Aux yeux des Le Pen, qu’est-ce qui est essentiel? Comme l’indique Jean-Yves Camus, chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), «le cœur de la doctrine de la droite identitaire est le refus du multiculturalisme…centralité de la question de l’identité…la hantise du métissage» (Le Monde du 15 janvier 2011).

Par ailleurs, Marine Le Pen n’a jamais condamné publiquement les propos de son père-qui font partie de l’essentiel de la doctrine du FN-tenus à l’hebdomadaire RIVAROL (7 janvier 2005) dans lequel il prétendait que «l’occupation allemande n’a pas été particulièrement inhumaine, même s’il y eut des bavures.»

Comme son père et le FN, Marine Le Pen défend bec et ongles les thèmes favoris de l’extrême droite :

- La préférence nationale veut couper «les pompes aspirantes» de l’immigration et

- Réformer le code de la nationalité,

- Rétablir la peine de mort,

- En finir avec un système fiscal accusé de «brider l’initiative et l’esprit de conquête économique» (Politis- 13 janvier 2011).

- Marine Le Pen contre le remboursement de l’IVG :

Dans un entretien à La Croix, mardi 15 février 2011, Marine Le Pen se dit favorable à un arrêt du remboursement de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) (Le Monde du 16 février 2011).

Elle-même assure, dans un entretien récent au quotidien maurrasso-pétainiste Présent (21 décembre 2010), être «dans la droite ligne» des députés FN qui, en 1986, se contentaient de demander… «le déremboursement» de l’IVG, et accuse le Planning familial d’être «une structure d’incitation à l’avortement […] en contradiction avec la loi de 1976» (Politis- 13 janvier 2011).

Marine Le Pen n’a pas remis en cause le contenu concret du programme du FN :

- Chasse aux sans-papiers et préférence nationale,

- Réduction des dépenses publiques (ce parti propose d’inscrire dans le préambule de la Constitution leur plafonnement à 35% du PIB !),

- Développement des régimes de retraite par capitalisation,

- Accession à la propriété au détriment du logement social.

- Conclusion : non seulement le FN opte pour le rejet de l’autre, mais il prend le parti du capital et de la propriété privée.

La laïcité : nouvelle arme raciste du FN

Pour Marine Le Pen, «il n’y a pas cinquante moyens de lutter contre l’islamisation de notre pays. Il y a soit la laïcité, soit la croisade. Comme je ne crois pas à la croisade, je pense qu’il faut user de la laïcité, qui n’est pas le laïcisme» (Présent du 22 décembre 2010).


Marine Le Pen veut s’appuyer sur un principe de la République Française afin de cibler la seule religion musulmane et prolonger ainsi la guerre quadridécennale du FN contre l’immigration.

La lecture par le FN- et par Marine Le Pen- de la laïcité est complètement biaisée, contraire à l’esprit républicain. L’extrême droite et les forces affidées ont transformé la laïcité en instrument d’inquisition et de guerre ethnique.

Pour les vrais républicains la laïcité c’est la tolérance, c’est le vivre ensemble. La tolérance laïque permet la vie en commun dans la diversité des désirs et des couleurs. La laïcité, c’est rechercher les éléments de convergence entre des cultures, des croyances, des philosophies. Chrétiens, juifs ou musulmans, nous sommes tous frères et vivons nos croyances dans le respect de celles d’autrui.

La laïcité ce n’est pas la police de la pensée, qui au pays des Lumières, brimerait les religions, les cultures, les croyances, les philosophies.

Les mensonges : paramètres variables et thèmes persistants

Les mensonges servent de paramètres variables aux frontistes. Faisant mine d’oublier leur servitude au capital, Marine Le Pen se trouve des affinités avec les couches populaires en France. Pour les séduire, elle promet de revenir au départ à la retraite à 60 ans, effaçant la référence à la retraite à 65 ans du site internet du parti.

Une étude détaillée du programme économique du Front national- publié en 1984- montre que «l’essentiel du volume est consacré à la défense des libertés économiques : apologie de l’entreprise privée, de son chef (le patron) et du profit, considérés comme des «moteurs de l’économie». A l’inverse, l’impôt est stigmatisé, la suppression de l’impôt sur le revenu est proposée, au nom de l’économie de l’offre. L’héritage poujadiste et un ancrage néolibéral sont ici nettement affirmés.

La crise financière de 2008 a conduit le Front national à radicaliser son opposition à la mondialisation. Dans un communiqué de Jean-Marie Le Pen du 9 octobre 2008, développé à l’occasion des élections européennes de 2009, on relève, en particulier : la sortie de la France du FMI, la «maîtrise» par la France de sa politique monétaire, l’«obligation d’intervention de l’Etat contre les raids boursiers étrangers», la «mise en place d’un plan de conservation du pouvoir d’achat au travers de l’application de la préférence nationale» (sont concernés ici l’emploi, le logement et les aides sociales), la «suppression» de la TVA sur les produits alimentaires de première nécessité et le retour au contrôle des prix par l’Etat.

Les dirigeants frontistes multiplient les prises de position contre les agents de notation et l’ultralibéralisme, insérant, de fait, le FN dans une mouvance anticapitaliste et antilibérale.

La lecture des discours et des propositions actuelles du FN pourrait donner le sentiment d’une contradiction profonde entre les années 2010 et les décennies précédentes. En fait, le procès qu’instruit le FN en fustigeant «l’ultralibéralisme», la «spéculation» et les «élites mondialistes» n’est pas celui de l’ensemble du capitalisme, mais de la «finance».

La lecture, non des tracts, mais du programme économique du FN atteste l’existence de thèmes permanents au fil du temps : rejet de l’Etat-providence, dénonciation des «rigidités réglementaires», souci de créer par la baisse de la pression fiscale un «cadre favorable à l’entreprise». Aujourd’hui, comme hier, l’impôt est stigmatisé au nom des théories de l’économie de l’offre, de la «révolution conservatrice américaine» et du reaganisme. Elles se combinent avec le thème, fondamental, de la «préférence nationale»».(Olivier Dard- Professeur d’histoire contemporaine à l’université Paul-Verlaine- Metz- Le Monde du 15 janvier 2001).

On voit bien que la propagande officielle du FN, affichant ce parti soucieux des préoccupations des couches populaires de «souche»- lorsqu’il propose la «mise en place d’un plan de conservation du pouvoir d’achat au travers de l’application de la préférence nationale» ou le départ à la retraite à 60 ans- n’est qu’un mensonge savamment distillé, destiné à tromper les esprits simples.

Selon les journalistes du quotidien Le Monde, dépêchés à Tours, «de même, ce parti qui a eu comme cofondateurs plusieurs anciens collaborateurs, des anciens miliciens ou des anciens Waffen-SS, voit sa présidente invoquer les «résistants de 1940» et affirmer incarner «l’esprit de Résistance.» (Le Monde du 18 janvier 2011).

Les mensonges ne s’arrêtent pas à la récupération de la Résistance de la part d’un courant pétainiste, héritier des collaborateurs et admirateur de l’occupant nazi. Avancer de fausses statistiques est un autre subterfuge lepéniste.

Lors d’une conférence de presse au siège du parti d’extrême droite, lundi 21 février 2011, Marine Le Pen a accusé le gouvernement de dissimuler les «vrais chiffres» de l’immigration et dénoncé «un secret d’Etat» (Le Monde du 23 février 2011).

Journaliste du quotidien Le Monde, Elise Vincent écrit : «CONTRAIREMENT à ce qu’affirme la présidente du Front national, Marine Le Pen, les chiffres sur l’immigration qu’elle a rendus publics, lundi 21 février, ne sont pas un «secret d’Etat». Deux exemples parmi tant d’autres : selon Marine Le Pen, 19864 titres de séjours auraient été délivrés en 2010. Soit une augmentation «terrifiante» de 13,2% par rapport à 2009. Selon le ministère de l’intérieur, l’augmentation ne serait que de 3%.

Selon Marine Le Pen, l’immigration familiale aurait augmenté de 7,5% en 2010. Pour le ministre de l’intérieur, il y aurait en réalité une baisse de 2%. Les chiffres sont très en deçà de ceux de 2004, où 94384 titres avaient été accordés.

L’objectif des identitaires c’est agiter la peur de l’autre, frapper l’imagination des gens simples et mal informés. Leur faire croire, mensonges à l’appui, que la France est «envahie» par des étrangers, de surcroit, des musulmans qui débarquent en France par navires entiers pour «piquer le pain et le travail» des Français.

Des comparses de la droite identitaire à l’UMP

Une trentaine de députés UMP, regroupés dans un «Collectif de la droite populaire», se sont illustrés par leur surenchères verbales ou législatives à l’encontre des homos, des immigrés ou des plus précarisés. Instaurer des tests ADN avant d’accorder un visa à des étrangers souhaitant rejoindre leur famille en France ? Une idée de Thierry Mariani, rejetée par le Parlement en 2007. Exclure les personnes sans papiers des centres d’hébergement d’urgence ? Encore Mariani. Militariser «certains quartiers», devenus des zones de guerre tribales? Un souhait de son collègue Lionnel Lucas, un ancien de la Légion étrangère et favorable à la peine de mort. Etc., etc.

Les députés de la droite «populaire» n’épargnent pas les politiques sociales. Les 35 heures ? Une «démagogie criminelle du socialisme en France». La durée légale du travail ? «Un concept du XIXe siècle» qu’il faut purement et simplement «supprimer» selon Lionnel Lucas, également opposé au RSA.(Politis du 13 janvier 2011).

Les deux courants- Front national et «collectif de la droite populaire», voire l’UMP- vont-ils se rejoindre bientôt ? Les mieux avertis estiment que l’unité stratégique s’est déjà faite dans les têtes. La nomination de Gérard Longuet- un ancien d’Occident qui a participé à la rédaction du programme du Front national- au ministère de la défense et celle de Brice Hortefeux, un catholique intégriste et proche de la droite «populaire», comme conseiller de la présidence, sont-elles un signal envoyé en direction de la droite identitaire ?

Tout porte à croire que rendez-vous est pris pour les élections présidentielles et législatives de 2012.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire