mercredi 28 novembre 2012

Appel au rassemblement contre les homophobes, pour le vivre ensemble



Non à l’homophobie. Oui à l’égalité de droits pour tous

Depuis le lancement du débat sur le «mariage pour tous», les forces réactionnaires et homophobes de tous bord- les catholiques intégristes, les traditionnalistes, la conférence des évêques, l’extrême droite - ont trouvé l’occasion de s’opposer au progrès social.

CIVITAS, institut intégriste qui, selon ses propres termes, est «engagée dans l’instauration de la Royauté sociale du Christ sur les nations et les peuples en général, sur la France et les Français en particulier» s’agite par-ci, par-là pour distiller la haine de l’autre, en particulier la haine de nos concitoyens homo et lesbiennes. Son président, Alain ESCADA, organise, mercredi 28 novembre, salle Mozart à Strasbourg, une conférence débat pour dire : Non au « mariage homosexuel ; non à l’adoption d’enfants par les homos.»

Pour Justice & Libertés, la conférence homophobe de CIVITAS est une menace pour le vivre ensemble.

Afin de dénoncer le caractère réactionnaire et intolérant de la conférence, nous appelons nos camarades disponibles ainsi que tous les démocrates, anti-intégristes, antifascistes et citoyens épris de liberté à se rendre devant la :


Salle Mozart- 1, Rue du Miroir (place Gutenberg- rue Gutenberg- rue du Miroir, à côté du chausseur Méphisto)
               Mercredi 28 novembre- 20H

                                                                                Comité de vigilance

dimanche 28 octobre 2012

Bulletin n° 49


Vigilance
Info
N°49 – novembre-décembre 2012
Bulletin de
Justice & Libertés
Comité de vigilance contre l’extrême droite et pour le respect de l’Etat de Droit
 
         Exclusion et rejet :
     Valeurs communes à
         l’UMP et au FN

Les efforts de Nicolas Sarkozy pour «extrême droitiser» l’UMP ont-ils fini par aboutir ? En effet les indices de convergence politique et idéologique se multiplient entre l’UMP et le FN.

Un militant marseillais de l’UMP, partisan d’une «droite dure», estime que dans son département «il n’y a qu’un «petit pont» entre l’UMP et le FN»(1). «Petit pont» ou  «boulevard», nous allons confronter les propos et réactions des représentants (élus ou non) de l’UMP et du FN, exprimés ou observés à propos de différentes questions de société.

Commençons par les «centres éducatifs fermés» (CEF). Les CEF, créés par une loi Perben de 2002, sont de petites structures qui accueillent 10 à 12 mineurs récidivistes de 13 à 18 ans, encadrés par une vingtaine d’éducateurs, pour six mois, renouvelables une fois. Le contrôleur général des lieux de privation de libertés s’était inquiété, le 1er décembre 2010, du «recours abusif, parfois usuel, des moyens de contraintes physiques» envers ceux qui restent «des enfants en difficulté(2)

 Pas d’espace public pour les
 agités «identitaires» (suite, page 3)



Voici l’état des lieux du CEF de Savigny-sur-Orge (Essonne) : «la situation dramatique de cette structure après sept mois d’observation. Tout est sale, dégradé et délabré» écrit la directrice du CEF. «Les mineurs mangent directement dans le plat par manque de vaisselle (…) Ma mission devient très difficile, sinon impossible


La garde des sceaux, Christiane Taubira, s’est prononcée contre les CEF et pour des centres en milieu ouvert qui limiteraient la récidive à 80% et que les transformer en centres fermés serait «incongru».

Voici quelques réactions-prises de position- presque identiques de la droite et l’extrême droite aux propositions de la garde des sceaux. «Mme Taubira défend une vision idéologique, passéiste et naïve d’une justice qui refuse toute place à la sanction » (Eric Ciotti, secrétaire national de l’UMP à la sécurité). La ministre mène une politique caractérisée par «une fascination envers le délinquant criminel» (Wallerand de Saint-Just- Front national).

Primer le répressif sur l’éducatif- qualifié par Eric Ciotti ou Wallerand de Saint-Just «vision idéologique, passéiste, naïve» ou «fascination envers le délinquant criminel»- constitue la culture sécuritaire commune à l’UMP et au Front National.

«L’Aide médicale de l’Etat» (AME) constitue un autre champ de convergence UMP-FN. Le FN vise ni plus ni moins à supprimer ce dispositif destiné à prendre en charge les dépenses médicales des étrangers sans ressources en situation irrégulière(3). Le FN, lui, voit dans ce dispositif «un appel d’air à l’immigration clandestine, alimentant les réseaux mafieux(3)

A son tour, président du groupe UMP à l’Assemblée Nationale, Christian Jacob a annoncé que les députés UMP seraient «très offensifs» sur l’AME. Dominique Tian, (UMP, Bouches-du-Rhône) dénonce l’AME, dans les mêmes termes que le FN : le «tourisme médical» qui alimente «des filières mafieuses» (3). Une position basée sur «l’exclusion et l’affrontement» et dénoncée par Marisol Touraine, ministre des affaires sociales.

Patrick Roger, journaliste au quotidien Le Monde, relève à juste titre que «sur certains thèmes, les mots de députés de droite rejoignent ceux de l’extrême droite. Les deux élus du FN se sentent alors peut-être un peu moins seuls(3) En effet, le débat sur la suppression du «droit de timbre» pour l’accès à l’AME accordée aux étrangers sans ressources en situation irrégulière, a offert l’occasion aux deux députés du FN, Marion Maréchal-Le Pen (Vaucluse) et Gilbert Collard (Gard) de descendre du dernier rang pour venir s’assoir à côté de leurs collègues de l’UMP, parmi lesquels ils se sont fondus(4).

La convergence entre l’UMP et le FN s’observe également sur la rafle du Vél’d’Hiv. Dimanche 22 juillet, au square des Martyres juifs, sur les lieux mêmes de l’ancien Vélodrome d’hiver, quai de Grenelle à Paris, le président de la République, François Hollande a rappelé, d’une part, que «la vérité, c’est que le crime fut commis en France, par la France», et d’autre part que : «pas un soldat allemand, pas un seul, ne fut mobilisé pour l’ensemble de cette opération

La réaction de l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, n’a pas tardé à venir. Il se dit «scandalisé» par les propos de François Hollande sur la rafle du Vél’d’Hiv. Selon lui « …la France n’a rien avoir avec cela». Il faut rappeler que le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) dénonce les propos de M. Guaino (5). Qu’en pense Florian Philippot, l’un des vice-présidents du FN ? Selon lui, «il faut cesser de culpabiliser les Français»(7). Henri Guaino et Florian Philippot n’ont pas été démentis par leurs partis et nous estimons qu’ils parlaient au nom de leurs organisations respectives.

Un observateur averti ne trouve aucune différence entre la position de l’UMP et du FN sur la rafle du Vél’d’Hiv.

Ce n’est plus un secret pour personne que le rejet de l’étranger ou du Français d’origine étrangère est la marque de fabrique de l’UMP et du FN. Tout le monde se souvient encore d’Amine, militant d’origine maghrébine de l’UMP, participant à l’Université d’été 2009 de son parti. Alors ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux avait tenu des propos racistes sur Amine: «quand il y en a un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes… ».

Sous Sarkozy, l’immigré était la cible favorite et permanente des ministres UMP et du FN. Par exemple, pour lutter contre la «fraude sociale», Claude Guéant, alors ministre de l’intérieur, ciblait les étrangers. Il avait annoncé la «connexion», dès le 1er janvier 2012, «des fichiers des étrangers résidents en France et des fichiers de Sécurité sociale»(8). Selon les journalistes du quotidien Le Monde qui ont rédigé l’article, «l’annonce de M.Guéant s’inscrit dans la droite ligne des thèmes de campagne de l’UMP. Elle reprend aussi un sujet défendu par le candidate du FN à l’élection présidentielle, Marine Le Pen.»(8)

Or, la fraude fiscale des allocataires-Français et étrangers confondus- estimée par la Cour des comptes à environ 3 milliards d’euros par an, ne pèse rien face à la fraude fiscale des entreprises et des ménages aisés, qui s’élève, quant à elle, à 45 milliards d’euros (9). L’évasion fiscale s’élève à 50 milliards d’euros (12) et l’équivalent de dix fois la richesse de la France est caché dans les paradis fiscaux (13).

Imitant Marine Le Pen, Claude Guéant va jusqu’à dire que «la France accueille «trop» d’étrangers en situation régulière»(10).

Durant le quinquennat Sarkozy, pour exprimer leurs idées, l’UMP et le FN utilisaient le même langage : coût du travail et non salaire, «charges sociales et non cotisations, assistanat et non droits sociaux, libéralisme et non capitalisme, Etat-providence et non Etat social de droit». (11)

Les dirigeants de l’UMP ont-ils bien reçu le message que les Français leur ont envoyé à l’occasion des élections présidentielles et législatives 2012 ? Critiquant le «ni, ni»-ni alliance électorale avec le PS ni avec le FN- imposé lors des dernières législatives par l’UMP, François Baroin, l’ancien ministre de l’économie a dit : «on a perdu les municipales, les régionales les cantonales, les sénatoriales, la présidentielles, les législatives, il faut tirer les enseignements de tout ça»(14)

Pour l’ancien ministre, si 21 députés de la Droite populaire ont été battus aux dernières législatives, c’est la preuve que «l’opinion n’approuve pas» la course derrière le FN.

Mais, l’UMP est parcourue de courants divergents. Lionnel Luca, cofondateur de la «Droite populaire», fait une autre  lecture de l’échec des députés de son collectif. «Ce n’est pas la droitisation du discours qui fait perdre l’UMP, c’est le manque de droitisation des actes (…) Les gens attendaient le «Kärcher», ils ne l’ont pas eu… Du coup on a le vote FN(14)

Il y a du travail à l’UMP. Saura-t-elle revenir au bercail républicain ou continuera-t-elle à courir derrière le FN ? Le «collectif de la Droite populaire» et les «amis de Nicolas Sarkozy», association conduite par des Brice Hortefeux et des Nadine Morano, représentent un important courant situé à la droite extrême de l’UMP. Les républicains arriveront-ils un jour à se faire entendre ? Un sombre avenir attend l’UMP.
                                                                                                                                                                                                                A.R.


Pas d’espace public pour les agités «identitaires»

"Les lois de la physique politique sont tellement prévisibles: quand une partie de l'UMP, regroupée autour de Copé, mais avec une "résistance" de plus en plus molle de Fillon, reprend à son compte les vieilles lunes racistes et l es bobards véhiculées depuis des décennies par le FN, donnant à ce dernier un vernis de crédibilité, elle ouvre un boulevard à la droite de cette droite extrême, notamment avec les agités "identitaires": occupation du minaret de la mosquée de Poitiers, pétitions en ligne pour l'expulsion des clandestins, "jeune Bretagne" qui appelle à manifester devant un squat, convention identitaire annoncée à Orange le 29 octobre grâce à la bienveillance de Bompard... Il est plus que temps que tous les démocrates, celles et ceux qui ne veulent pas de ce climat d'intolérance brutale se manifestent avec nous. Pas d'espace public pour les fachos !"                                                                                                JLH                                                                                                                                         

mercredi 3 octobre 2012

Bulletin n° 48


Vigilance
Info
N°48 – septembre- octobre 2012
Bulletin de
Justice & Libertés
Comité de vigilance contre l’extrême droite et pour le respect de l’Etat de Droit
 
Pourquoi l’extrême droite est-elle
forte en Alsace ?

Après un bilan des actions et interventions-nombreuses et efficaces mais pas toujours très fournies en participants- de Justice & Libertés, et explications des associations sur leur manière de fonctionner- qui ont donné lieu à un projet de séminaire- nous débattons de l’étude intitulée : «Pourquoi l’extrême droite est-elle forte en Alsace ? » reproduite ci-dessous.

«Les saisons d’Alsace» de l’été 2005 ont annoncé «la fin du silence». Dans un article du type éditorial, Philippe Breton développe «l’immense silence qui a longtemps recouvert l’Alsace (…) silence auquel on a parfois opposé l’absence du «devoir de mémoire»»(1). Il énumère les sujets soumis à la loi du «silence» : silence sur les ralliés par opportunisme et sur les nazis par conviction ; sur ce que le bras a dû faire ; sur ceux qui sont restés et ont subi dans leur chair la violence de la propagande et de la torture des consciences ; sur les enrôlés de force, dans les multiples organisations nazies,…dans les SS ; sur les résistants ; etc. En parlant du «nécessaire silence», Philippe Breton conclut à juste titre : «le silence n’est pas l’oubli

Certes, l’objectif n’est pas de citer tous les sujets concernés par le «silence» et répertoriés par «Les saisons d’Alsace». Mais, force est de constater qu’un «silence» n’a pas eu droit de cité : le silence sur l’intensité de la propagande anti-juive de l’appareil nazi, alimentant l’antisémitisme en Alsace. Un silence qui continue à empoisonner la vie en Alsace.
Intéressons-nous à deux thèmes soumis au «silence» :


A-    La nazification de l’Alsace et la collaboration ;
B-    L’antisémitisme.
Pour développer ces thèmes-et afin de rester au plus près des évènements-je fais appel aux historiens et aux sociologues.

A-    Dans le cadre de la nazification de l’Alsace, «un vaste programme est mis en œuvre à marches forcées par le Gauleiter Wagner» : stage de rééducation (Umschulung) à l’idéologie nazie pour les enseignants et les fonctionnaires, surveillance des faits et gestes de la population par des Blockleiter et des Zellenleiter, affectation forcée de jeunes alsaciens dans les organisations de la jeunesse hitlérienne, période d’instruction des jeunes dans le Reichsrbeitsdiest (RAD), adhésion des salariés au Deutsch Arbeisfront, serment au Führer des fonctionnaires, etc. (Les saisons d’Alsace- été 2005- page 44- Leçon n°2).

Tous les observateurs de la période 1940-1945 insistent sur l’acharnement des occupants allemands à nazifier l’Alsace. Les quelques lignes que je viens de citer ne suffisent pas à rendre compte du travail systématique de l’appareil nazi en Alsace. Disons simplement que l’effort de propagande était particulièrement centré sur les jeunes. Combien d’entre eux ont définitivement rejeté l’idéologie nazie ?

Il y a des interrogations sur l’attitude des Alsaciens durant l’annexion.

Eugène Riedweg a qualifié leur comportement de globalement «attentiste». (Les saisons d’Alsace- été 2005- page 45).

Pour Bernard Vogler, «il s’agissait d’abord de survivre au jour le jour, de gagner du temps, parfois en donnant un gage pour avoir la paix. Résister, c’était risquer de se faire envoyer au camp de correction de Schirmeck». (Les saisons d’Alsace- été 2005- page 45).

Alfred Wahl est, lui, plus ferme : «certains Alsaciens se sont indubitablement ralliés volontairement au régime nazi. Leur adhésion allait bien au-delà d’une collaboration minimale. Mais, dans l’ensemble, on peut dire que la plupart des Alsaciens a été dans l’obligation de se rallier au système : il s’agissait en quelque sorte d’un ralliement de force.» (Les saisons d’Alsace-été 2005- page 45).

Pour Nicolas Stoskopf, «le concept d’attentisme ne reflète pas correctement le comportement d’ensemble des Alsaciens restés dans leur région pendant la guerre. (…) D’une certaine façon, les Alsaciens sont massivement et collectivement compromis, et cela se paye au regard de l’histoire.» (Les saisons d’Alsace- été 2005- page 45).

Existe-t-il une ligne de démarcation entre «ralliés de force» et collaborateurs, qualifiés par Alfred Wahl de «ralliés volontairement au régime nazi» ?

Après avoir classifié les «ralliés» en «vrais» et «faux» collaborateurs, Jean-Laurent Vonau, professeur émérite de l’Université de Strasbourg, qualifie de «évidemment…bien sûr suspects» les Alsaciens entrés dans la SA. Il ajoute : «plus on montait dans la hiérarchie, plus le ralliement était perceptible.» Par contre, «les membres du parti (les PG-Partei Genosse) étaient très majoritairement des nazis convaincus.» Combien étaient-ils ? «En juin 1944 le Gauleiter considérait que 75000 personnes étaient membres : 25000 Alsaciens et 50000 Allemands vivant en Alsace. Cela représentait alors, selon Riedweg, 2,3% de la population alsacienne.» Ainsi, «parmi les premiers ralliés, on constate fréquemment qu’un de leurs parents était allemand, le plus souvent la mère.» Et «un membre de la Hitler Jugend avant le 1er janvier 1942 est forcément un volontaire. (…) Les volontaires dans la Wehrmacht ne sont repérables que jusqu’au 25 août 1942.» (Les saisons d’Alsace n°44).

Historien et l’auteur d’une thèse consacrée à «La politique de nazification en Alsace», Lothar Kettenacker, est plus catégorique. Selon lui : «la population alsacienne était globalement d’accord avec l’annexion. Cependant, les autonomistes (mais pas leur composante catholique, plus régionaliste qu’irrédentiste) ont diffusé des idées fascistes et ont préparé le terrain.» Depuis combien de temps? Ce qui laisse à penser que la nazification de l’Alsace est antérieure à 1940.

Partageant l’avis de Lothar Kettenacker, Léon Strauss écrit : «lors de l’annexion, le terreau est en partie favorable au national-socialisme. Des aspects totalitaires du régime sont connus et acceptés dans certaines catégories, notamment chez les protestants luthériens

Lorsque Nicolas Stoskopf, historien, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Haute-Alsace, écrit que «les Alsaciens sont massivement et collectivement compromis », connaissait-il la position de Lothar Kettenacker et de Léon Strauss ?

Dès lors, il devient difficile de limiter le nombre des Alsaciens acquis à l’idéologie national-socialiste aux «volontaires» et aux membres du «NSDAP», donc à 2,3% voire 3% (selon Jean-Laurent Vonau- Les saisons d’Alsace n°44-page 101) de la population.

Globalement attentistes, ralliés volontaires au régime nazi, ralliés de force, Alsaciens compromis massivement et collectivement, volontaires, suspects, nazis convaincus…Force est de constater, primo, que beaucoup d’Alsaciens se sont, volontairement ou involontairement, compromis avec l’occupant nazi et son idéologie national-socialiste ; secundo, que les historiens ont beaucoup de divergences.

Une chose est sûre : l’idéologie nazie a été propagée en profondeur en Alsace, après que le terrain eut été préparé par des autonomistes germanophiles. D’autant plus que, «beaucoup d’Alsaciens, dont le grand-père avait été allemand entre 1870 et 1918, ne considéraient pas comme un crime de redevenir allemands. Ils n’interprétaient pas leur statut comme un passage au nazisme mais comme un retour à l’Allemagne suivant le balancier de l’histoire.» (Marc Ferro- Les saisons d’Alsace d’été 2005-page 40).

Parlant des «individus (qui), en dehors de toute contrainte, (…), décidèrent de s’engager du côté des nazis», Jean-Laurent Vonau écrit : «l’ordre et la discipline étaient, avec le travail, la famille, la terre, leurs valeurs de référence.» (Les saisons d’Alsace ; n° 44-page 98). Comment interpréter  les penchants actuels de certains Alsaciens, qui se définissent encore par rapport aux dites «valeurs de référence» ?

Lorsque Philippe Breton caractérise l’Alsace comme «laboratoire malgré elle de l’effet à long terme de la propagande et (…) empêtrée aujourd’hui dans son rapport paradoxal à l’extrême droite», pensait-il à la persistance des traces de l’idéologie nazie, encore vivantes, dans le subconscient de l’Alsace profonde, soixante-sept ans après la fin de la deuxième guerre mondiale, en 1945 ?
Dès lors une question taraude un observateur averti : lesdites traces constituent-elles le plus important des «silences», guidant ou renforçant l’ensemble des non-dits et des préjugés ? Constatons simplement qu’un immense silence perdure, qui recouvre encore la nazification et la collaboration en Alsace. Ce silence-là n’est pas prêt d’être rompu.

(1) Marc Ferro, lui, préfère effectuer non pas un devoir de mémoire, mais un travail de mémoire. (Les saisons d’Alsace-été 2005-page 40).
                                                                                                 A.R.
    


      La discussion s'amorce:

  _ On effectue un parallèle entre le silence qui entoure la nazification de l'Alsace et celui qui concerne la guerre d'Algérie, de même qu'entre les Alsaciens et les Harkis.

 _ L'Alsace a été partagée entre deux pays depuis Louis XIV. Identité fragile: L'Alsace était Allemande de 1870 à 1918. Il ne paraissait pas anormal à certains de redevenir allemands.

 _ Les conditions de la Résistance en Alsace étaient beaucoup plus dures qu'ailleurs en France. 200 000 Alsaciens se sont réfugiés dans le Sud-ouest. Sur chaque stèle du Limousin, on trouve des noms de résistants Alsaciens.

 _ la tentation de l'extrême-droite n'est pas une particularité alsacienne: le Var, qui accueille nombre de pieds noirs, est un fief de l'extrême-droite. A Nice, bien dotée en forces de police et en caméras de surveillance, elle parade, ce qu'elle ne réussit pas à faire à Strasbourg, grande capitale de gauche  et qui n'hésite pas à porter des femmes aux plus hautes responsabilités, ce qui est inédit en France.

 _ L'extrême-droite est le bras armé du grand capital. Les déçus d'une gauche capitaliste sont tentés par elle.
 _ Les medias informent peu sur les mobilisations contre l'austérité en Espagne et au Portugal et sur les progrès économiques qui accompagnent la démocratie en Amérique Latine (Brésil, Equateur).

 _ Mais la particularité concordataire de l'Alsace, où christianismes et judaïsme sont enseignés à l'école dans des cours séparés favorise le communautarisme. Il vaudrait mieux un enseignement global sur les religions, en classes entières. (À débattre. Laïcité d'accord fait un gros travail sur le concordat d'Alsace-Moselle).

Aucun des éléments cités ci-dessus n’est le déterminant essentiel du particularisme alsacien mais la somme d’éléments, tels que ceux donnés en exemple ci-après, explique la position d’une partie de l’électorat alsacien qui trouve dans certains propos de l’extrême droite un écho concordant à certaines convictions ou ressentis bien ancrés.

Eléments nourriciers de cette attitude :

Histoire d’une région «ballottée» entre 2 cultures opposées ;
Situation géographique (enfermement entre 2 chaînes de montagne séparées en plus par un fleuve objet de toutes les convoitises depuis des siècles) ;
Subsistance tenace d’un dialecte à ne pas confondre avec un patois ;
Utilisation de termes tels que «à l’intérieur» ou «en France» ;
Droit local maintenant un particularisme qui, dans le cadre notamment du concordat, a communautarisé autour de leurs églises des populations dont les rapports n’étaient pas, durant des décennies, conviviaux.

Sens de la discipline plus affuté qu’ailleurs et provenant des contraintes imposées principalement par la présence germanique ; il en découle une réceptivité accrue du respect des ordres et de « l’Ordre ».
Monopole d’un média écrit dominant et nombriliste cultivant savamment et de façon destructrice le culte d’une information d’extrême proximité et donc isolatrice et actrice du rejet par ignorance «des autres».

Tout ceci constitue, entre autres, une pile de raisons faisant de l’Alsace un territoire «pas comme les autres» ; seul le temps pourra atténuer ce particularisme dont les Alsaciens sont encore imbibés de façon consciente ou inconsciente. Le temps a déjà commencé son œuvre, dans la Communauté urbaine de Strasbourg le vote de gauche progresse.

  La conclusion fut que toutes les organisations qui militent à Justice & Libertés ont pour point commun de lutter contre les différents facteurs qui font le lit de l'extrême-droite (idéologie-désinformation-propagande- crise économique- manque de démocratie dans la construction européenne – ignorance- méconnaissance de l'autre- manque de moyens d'expression- etc.)

jeudi 31 mai 2012

Lettre ouverte à Monsieur le Préfet du Bas-Rhin


    Justice & Libertés



Comité de vigilance contre l’extrême droite
 et pour le respect de l’Etat de Droit
                                                                                                                                                      
                                        justiceetlibertes2@gmail.com
                          http://collectifjusticeetlibertes.blogspot.com

                
                                  Strasbourg, le 28 mai 2012

Monsieur le Préfet du Bas-Rhin,
                                                     
Comme vous le savez « l’humoriste » Dieudonné doit présenter son spectacle, « Rendez-nous Jésus », le mardi 12 juin, au Zénith de Strasbourg. 
«L’humoriste» est connu pour ses penchants négationnistes et antisémites prétendument antisionistes. Le 26 décembre 2008, Dieudonné avait invité sur la scène du Zénith de Paris le négationniste Robert Faurisson pour lui remettre un « Prix de l’infréquentabilité et de l’insolence » par son régisseur Jacky, vêtu d’un pyjama de déporté rayé arborant une étoile jaune. Tout le gratin antisémite et négationniste tels Serge Thion et Pierre Guillaume -  principaux animateurs du site Internet négationniste Aaargh (Association des anciens amateurs de récits de guerres et d’holocaustes), domicilié à l’étranger et sous le coup d’une interdiction d’accès en France- font partie de la galaxie Dieudonné.
A Strasbourg, le ton est donné, comme nous l'indique ce mail de Didier Kahn, un citoyen strasbourgeois, adressé le 26 mars 2012 à Justice & Libertés :
«Chers amis de Justice et Libertés, 
 J’ignorais cette information relative à la venue à Strasbourg de Dieudonné, lorsque samedi dernier [24 mars 2012] vers 18 h30, deux individus déguisés en Juifs religieux (redingote, chapeau, barbe avec les boucles descendant des cheveux, …) distribuaient des tracts en format A 5 dans la rue du Marché (qui mène vers la place des Halles). 
Ayant refusé ce flyers, je me retourne en les entendant parler en se marrant de Dieudonné à une jeune passante. C’est alors que je réagis qu’à cette heure d’un samedi, aucun Juif religieux ne diffuserait des tracts.» 
Le spectacle de Dieudonné sera à n'en pas douter une réplique de ses anciens spectacles basés sur l’antisémitisme et le négationnisme, dont l’expression est punie par la loi Gayssot du 13 juillet 1990 « tendant à réprimer tout propos raciste, antisémite ou xénophobe », et précisant dans son article 9 que « la contestation de crimes contre l'humanité » constitue un délit. Ce personnage a déjà été condamné à trois reprises pour « incitation à la haine raciale ». Ce spectacle indigne a été interdit à Montréal et Metz, interrompu à Bruxelles le 9 mai par la police pour le motif mentionné ci-dessus ; devant la salle où attendaient les spectateurs,  quelqu'un tenait des propos xénophobes et incitait la foule à faire le salut nazi !Enfin, Dieudonné a réalisé récemment un film, une parodie d'Auschwitz.
C’est pour toutes ces raisons que nous  vous demandons, en application de la loi, d'interdire le spectacle qui pourrait influencer nos compatriotes notamment ceux qui trouveraient dans le spectacle de Dieudonné l’expression de leur dépit, voire une forme de revanche contre le traitement, hautement condamnable par ailleurs, subi par le peuple palestinien. La période électorale facilitera encore l’exacerbation de tensions intercommunautaires à Strasbourg dont les conséquences pourraient s’avérer néfastes pour le vivre ensemble dans notre cité. Une preuve supplémentaire de ces tensions, sont ces nouveaux passages à l'acte sur un  lieu de culte musulman le 22 mai à l’Elsau.
Pour votre information, Justice & Libertés compte appeler à un rassemblement mardi 12 juin devant le Zénith de Strasbourg.  
Veuillez croire, Monsieur le Préfet du Bas-Rhin, en notre attachement aux valeurs qui favorisent le vivre ensemble et la tolérance.

jeudi 29 mars 2012


Vigilance

Info

N°46 − mars 2012

Bulletin de

Justice & Libertés

Comité de vigilance contre l’extrême droite et pour le respect de l’Etat de Droit


Politiques libérales

Crises et fascisme

La crise de 1929, comme celle de 2008, est partie des Etats-Unis ; elle s’est rapidement répandue dans les pays développés, en particulier en Europe et en Amérique latine.

Elle a les mêmes causes, surproduction et suraccumulation de capitaux, boom spéculatif des banques. Elle engendre les mêmes effets avec des faillites, un chômage massif, et aux Etats-Unis un endettement des ménages estimé à 10 milliards de dollars.

Quant aux conséquences politiques, la crise de 1929 occasionna un virage à droite et une fascisation dans la plupart des pays : en Amérique latine, 12 pays passèrent à des gouvernements d’extrême droite dont 10 dans le cadre de coup d’état militaire.

(Suite page 2).

Le FN du côté du peuple ? Sarkozy «candidat du peuple» ? On ne va quand même gober ça!

Le ras le bol, la colère de nos concitoyens sont compréhensibles : les mensonges et les promesses non tenues du pouvoir actuel, la crise du capitalisme qui les plonge dans la précarité, l’incertitude devant l’avenir, ou même la pauvreté, les salaires bloqués ou en baisse alors que les prix flambent en sont des raisons suffisantes. (Suite page 4)


En Europe, l’effet politique le plus lourd de conséquence fut la victoire en Allemagne du régime nazi d’Hitler en 1933 avec l’appui de l’oligarchie industrielle de ce pays. Peu après, ce fut les dictatures féroces de Salazar au Portugal et de Franco en Espagne.

A ce premier constat du lien entre crises et fascisme s’ajoute le fait que ultra droite, fascisme, nazisme furent les réponses des milieux dirigeants face au danger de la révolution sociale (vocabulaire d’époque), de la montée en puissance sur la scène politique de la classe ouvrière et à la propagation possible de la révolution d’octobre. En France, dès 1931, les milieux dirigeants de droite, préparent une relève politique d’extrême droite avec un gouvernement Pétain-Laval (Pétain est avec Weygand chef de la branche militaire de la Cagoule). L’objectif est d’abattre la IIIème République (la Gueuse) et d’instituer un gouvernement fasciste avec l’appui de l’Action Française, des Croix de Feu, des Jeunesses Patriotiques, ligues financées par les organisations fascistes d’Italie et d’Allemagne. La montée revendicative des mouvements sociaux, conjuguée à un puissant mouvement antifasciste permit la victoire du Front Populaire, retardant ainsi les plans de l’oligarchie qui touchent tous les domaines : sociaux, politiques, financiers, économiques, moraux.

Les politiques menées de 1920 à 1929 furent des politiques néolibérales (à l’ancienne) c'est-à-dire favorisant les profits d’une caste (les 200 familles) au détriment des besoins sociaux de la population accumulant les inégalités, suraccumulant les capitaux, gonflant de façon inconsidérée le crédit, conduisant ainsi à la crise. La crise de 1929 signe ainsi la condamnation de ce libéralisme. Il a fallu attendre plus de 50 ans pour voir réapparaître des régimes dits néolibéraux, différents des précédents (lire La révolution conservatrice américaine de Guy Sorman) et dont les prototypes entre les années 1970 et 1980 furent les gouvernements de Reagan aux Etats Unis et Thatcher en Grande Bretagne.

Aujourd’hui, bien des choses ont changé : les conditions de production, les progrès scientifiques techniques et médicaux… L’avancée des connaissances dans tous les domaines permet infiniment plus de richesse produite par le travail et le génie humain. Et pourtant, la situation s’apparente à celle de la crise précédente. C’est l’affrontement mondialisé entre le grand capital et le travail. Cette crise est totale, elle affecte tous les aspects de la vie, partout sur le globe, au point de mettre en péril la civilisation et l’existence de la planète. A cet égard, le grand capital utilise à son profit les institutions européennes et internationales, faisant de celles-ci des enjeux de lutte. Tel est le terreau qui permet une porosité accrue entre droite et FN en France.

II) Sarkozisme et Fascisme

La politique de démantèlement des liens de solidarité construits au cours du temps par de multiples luttes sociales et qui sont le fondement de notre action utilisent les thèses du FN, et même, en met en application certaines à l’aide d’un arsenal de lois répressives. Sans recourir à l’énumération bien connue de ces mesures cassant le modèle social français, on peut illustrer les arguments idéologiques utilisés par 4 exemples ;

. Accuser les divers gouvernements de gauche d’être responsables de la crise qui entraine l’austérité, et dénoncer avec un esprit revanchard le programme du CNR, la retraite à 60 ans, la semaine de 37 heures 30… et dans un même mouvement s’attaquer au droit du travail. Au slogan Travail, Famille, Patrie de Pétain, répond en écho le triptyque de Sarkozy Travail, Responsabilité, Autorité.

. Attribuer la responsabilité des souffrances de la population à des boucs émissaires, en propageant une idéologie d’Etat raciste, axée essentiellement sur l’islamophobie, vantant la supériorité de notre civilisation et ses racines chrétiennes (?). Le but est de diviser les salariés, de les opposer les uns aux autres, de rendre la population docile en flattant son besoin de sécurité, bref de distraire l’opinion publique des questions essentielles et d’arriver à dissocier le vote des électeurs de leurs intérêts propres.

. Attaquer les corps intermédiaires. Sarkozy stigmatise les instances de la République, de l’Etat de Droit et ses représentants : les élus, les syndicats, les fonctionnaires etc. sont ainsi livrés à la vindicte populaire.*

.Valoriser le modèle allemand. L’exemple allemand est donné en promotion aux Français pour aider à les convaincre d’accepter toujours plus d’austérité. Pour cela, aidé par une certaine presse, Sarkozy n’hésite pas à falsifier la réalité qui est bien moins brillante que celle qui nous est présentée, sauf, bien sûr, pour une petite caste de privilégiés. La réalité quotidienne pour la population allemande est que des millions d’hommes et de femmes en sont réduits à la soupe populaire et plus de 2 millions de salariés gagnent moins de 5 euros par heure ; la réalité est que plusieurs centaines de milliers de retraités de 65 à 75 ans sont obligés de chercher des petits boulots pour survivre.

Avec des conditions différentes, ces positions politiques présentent des constantes indépendantes de ces époques. Ainsi, le régime de Vichy, désigne dans sa propagande, les responsables de la défaite : le Gouvernement de Front Populaire et ses acquis sociaux (la semaine de 40 heures et les 15 jours de congés payés…), une République, la Gueuse, confisquée par les Rouges, les étrangers, les métèques, les francs maçons, les juifs, les homosexuels. Bref, à deux époques différentes on retrouve la persistance des thèses maurrassiennes d’extrême droite de la fin du XIXème siècle. Et on en connait les monstrueuses conséquences politiques.

Sous Vichy, au-delà du Hitler plutôt que le Front Populaire, les milieux dirigeants vouaient une admiration sans bornes au modèle du IIIème Reich, en particulier pour les structures mises en place pour paralyser toute capacité de défense des salariés, bloquer toute lutte sociale, en clair toute prétention à revendiquer une augmentation de la part des salaires sur la valeur ajoutée créée par ces mêmes salariés. Dès 1940, le gouvernement de Pétain dissout les syndicats, crée des syndicats corporatistes sous contrôle du patronat, et avec le slogan Travaillez plus instaure la semaine de 48 heures à 70 heures selon les branches.

III) COMPLEMENTS D’ACTUALITE

Le monde actuel est secoué par une cascade de crises systémiques s’emboitant les unes aux autres. Par ce qualificatif, il faut entendre qu’elles touchent toutes les dimensions de l’activité humaine. Cela signifie en outre que les différents éléments constitutifs de nos sociétés, les institutions, les budgets, l’économique, le social, l’environnemental, le politique, forment un tout étroitement interdépendants où chaque élément peut être cause et effet de crises qui vont fortement perturber tout le système. Une conséquence de cette complexité est que, dans son déroulement au cours du temps, une situation donnée peut déboucher sur une multiplicité de possibilités politiques non prévisibles a priori.

Or, ce que l’on constate au contraire, c’est l’installation, dans la plupart des pays d’Europe, de gouvernements de droite et même d’ultra droite( la France ) ou fascisants (le gouvernement de Victor Ordan en Hongrie ) menant tous des politiques ultra libérales sous la férule de l’Union Européenne, avec ses instruments (Commission Européenne et BCE),elle-même servant de relais à des institutions internationales telles que le FMI ou l’OMC. La raison de cette situation tient dans un rapport de force dans le fameux conflit Capital/Travail, qui est aujourd’hui en faveur du Capital. Ce sont des gouvernements d’ultra droite qui conviennent le mieux pour satisfaire les exigences de profit maximum des gros détenteurs de capitaux. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de comprimer les dépenses publiques et les salaires, de procéder à des défiscalisations massives, provoquant ainsi une augmentation de la dette publique avec des conséquences très graves sur l’emploi, le chômage, la précarité, la santé, l’éducation. Il s’ensuit l’obligation, pour mener une politique néolibérale conséquente, d’un remodelage complet de toutes les sphères de la société, où le citoyen sera dépossédé de tout moyen d’intervention.

En France, c’est Sarkozy qui met en œuvre ce programme. Mais il n’a pu aller jusqu’au bout, car il s’est heurté à une forte résistance populaire qui s’est exprimée par de puissantes manifestations. C’est pourquoi ce théologien du libéralisme est obligé de jouer les prolongations pour terminer le job et éradiquer définitivement ce qui subsiste du programme du CNR. Continuer ce qu’il a commencé, c’est ajouter de l’austérité à l’austérité, aggraver les crises actuelles et en engendrer de nouvelles ; c’est fixer la Grèce comme horizon pour la France.

Il a été esquissé dans les deux premiers paragraphes la présence d’invariants entre des époques et des situations historiques différentes. Malgré ces différences, un élément commun est présent : le Grand Capital, hégémonique, utilisant toujours les mêmes recettes.

Dans ce contexte, l’Union Européenne joue sa partition en menant une offensive concertée destinée à reprendre au niveau supranational tout ce qui a pu être acquis par l’un ou l’autre pays dans les domaines sociaux et dans l’exercice de la démocratie. La signature, vendredi 2 mars, par Sarkozy d’un nouveau traité écrit sous la dictée de Madame Merkel constitutionalise l’austérité à perpétuité. Ce traité qui n’a été soumis à aucune instance parlementaire est un nouveau coup de force contre la souveraineté populaire. Il ne sera pas soumis par référendum au peuple français, alors que Sarkozy propose par ailleurs de multiples référendum destinés à stigmatiser chômeurs et immigrés.

Vouloir concilier les lois du marché et les besoins sociaux (et culturels : la réduction du temps de travail est autant un besoin économique qu’un temps de vie pris sur le temps de travail pour chaque individu ) est une exigence totalement irréaliste, ses deux termes étant irréductiblement incompatibles. Seule une rupture significative, rompant avec le libéralisme peut permettre de mener une politique au service des besoins de la société. Ce sera au peuple de trancher. En connaissance de cause ?

Le mot de la fin :

La guerre des classes existe, c’est un fait, mais c’est la mienne, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner. C’est Buffett qui a dit ça, deux F, deux T, Pas Marie Georges, non, Warren, première fortune mondiale.

G.M.


[[i] * Paul Kruman, Prix Nobel d’économie a qualifié ces leurres qui ont pour but de distraire la population des questions essentielles d’Armes de distraction Massives (ADM).]

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Le Front national du côté du peuple ? Le piège est vraiment trop grossier !

(Suite de la première page).

Alors que le nombre de millionnaires français n'a jamais été aussi élevé, que l'actionnariat est toujours rentable et que la bourse se porte bien, même pendant la crise, les systèmes de santé, d'éducation et de retraite sont maltraités, l'esprit de solidarité foulé aux pieds.

Beaucoup d'électeurs sont tentés de se tourner vers Marine Le Pen et le Front National, qui se prétend non compromise avec le système, et à l'écoute du peuple français dont elle affirme défendre les intérêts.

Une famille bien enrichie.

Pas plus que le couple Sarkozy, la famille Le Pen ne fait partie des « gens modestes », mais des multipropriétaires : maison de campagne près de Dreux, hôtel particulier à Saint-Cloud (suite à l'héritage du cimentier Lambert), 50 % de parts dans l'hôtel particulier de Montretout (!), estimé à 6,5 millions d'euros. Jean-Marie Le Pen fait régulièrement l'objet de redressements fiscaux, suite à des «oublis» dans ses déclarations. Elles soient donc bien loin, les origines populaires. Difficile alors d'être le candidat des « petites gens » !

Le Front National a déjà gouverné !

Aux élections municipales de juin 1995, Toulon, Marignane et Orange élisent un maire FN, comme « des points d'appui de la reconquête nationale », puis Vitrolles en 1997 : en plus d'une politique anti-culturelle et raciste, cette politique creuse les déficits, à cause d'une gestion calamiteuse. Ces élus ont très vite été battus, et ont disparu de la circulation, sauf Bompard à Orange, qui a quitté le FN, créant la «Ligue du Sud». La Chambre Régionale des Comptes souligne qu'une grande partie des dépenses de la mairie correspondent en réalité à de la consommation personnelle ; Mme Bompard Marie-Claude (maire de Bollène) est dans le même cas, avec des achats de nuits d'hôtel (détente) et de cigares. En voilà qui n'ont pas les « mains propres » !

Marine Le Pen est conseillère régionale dans le Nord Pas de Calais.

Jean-Marie Le Pen et sa fille, élus au Parlement européen de Strasbourg, sont parmi les recordmen de l'absentéisme ; Marine Le Pen siège (très peu : 2 fois sur 25) à la commission « Emploi et Affaires Sociales » du Parlement, dont elle fait partie. Père et fille interviennent rarement, ne proposent rien. Quand ils sont présents, ils votent avec la droite. Louis Aliot, le compagnon de Marine Le Pen, élu en 2010 au Conseil Régional de Languedoc-Roussillon, n'y siège pas souvent... Mépris pour les fonctions électives ou dégât collatéral du cumul des mandats ?

Le Front National est une girouette politique !

Comme le pouvoir sarkozyste a appliqué une grande partie du programme du FN, il est nécessaire pour ce parti de trouver de nouveaux thèmes pour s'y opposer.

Marine Le Pen, conseillère régionale d'Ile de France est pour les OGM, la même, plus tard, conseillère régionale du Nord Pas de Calais, est contre. Avant la catastrophe de Fukushima elle est favorable au nucléaire, après elle est contre. Un jour contre les «privilégiés» qui se battent pour leur retraite, un autre réclamant la retraite au bout de 40 annuités (sans âge de départ), enfin réclamant le départ à 60 ans (désaccord avec le père). Un programme qui varie au gré des sondages et des événements est-il sérieux ?

Le Front National prépare un rapprochement politique avec ceux-là même qu'il dénonce !

Un président bien conseillé : Patrick Buisson, ancien directeur de « Minute », actuel conseiller de Sarkozy, reçoit cet hommage de JM Le Pen : «Il a donné à Sarkozy les mots, les codes, le langage qu'il faut employer vis-à-vis des électeurs du F.N.» Le « Monsieur Opinion » de l' UMP et porte parole de Nicolas Sarkozy est Guillaume Peltier, un ancien du FN, et du MNR de Bruno Mégret. L'extrême- droite est implantée dans l'UMP !

Quelques exemples de ce que déclare «la droite populaire» (44 parlementaires!) : Pour Christian Vanneste et Lionnel Luca (député des Alpes Maritimes), les homosexuels sont «une menace pour la survie de l'humanité».

En septembre 2011, la droite populaire publie un programme en 12 points, dont « accroître la lutte contre l'assistanat », restreindre la Couverture Maladie Universelle, restaurer le délit d'outrage à la Nation etc.

«Minute», hebdomadaire d'extrême droite, a consacré un dossier à Thierry Mariani, ministre des Transports et patron de la droite populaire, dans lequel il affirme que Marine Le Pen « peut faire un beau résultat, mais cela ne lui servira à rien dans l'immédiat » !!!

La «droite populaire», dont l'objectif est constituer «un parti populaire, musclé et national» qui fait un copié -collé des idées de l'extrême-droite, négocie depuis au moins deux ans avec le FN pour une recomposition politique en cas d'échec du sarkozysme avec une partie de l'UMP radicalisée et un FN indispensable pour gagner des élections: le FN (représenté par Paul-Marie Coûteaux) et l'UMP (Guillaume Peltier) se rencontrent régulièrement. Pour préparer une alliance ? Voulons-nous imiter ce qui s'est passé en Italie (la Ligue du Nord associée au gouvernement Berlusconi), ou ce qui se passe en Hongrie, où des milices en uniforme paradent dans la rue ? De bien mauvais souvenirs...

Mais ça ne s'arrête pas là : en février, Claude Guéant, ministre de l'Intérieur, a affirmé l'inégalité des civilisations devant les étudiants de l'UNI (syndicat d'extrême-droite). Arno Klarsfeld président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, nommé par Sarkozy, a proposé le 13 mars la construction d'un mur de 130 kilomètres entre la Grèce et la Turquie : «Un mur c'est fait avec des barbelés, un mur quoi.» : ça tourne mal dans la famille des chasseurs de nazis !

Autre thème commun au FN et à l'UMP : la lutte contre la fraude sociale (Sécurité sociale, allocations chômage et familiales), qui est évidemment inadmissible, mais difficile à évaluer par définition (entre 4 et 20 milliards d'euros !, 1/ 1000e des dépenses de l'Etat selon le député PS Le Guen), mais il faut aussi se référer aux fraudes aux cotisations des employeurs, qui coûterait entre 8 et 15 milliards d'euros selon un rapport du député UMP M. Tian.

Ce n'est plus une passerelle qui relie le FN à l'UMP, c'est un véritable boulevard !

Le Front National n'a pas changé !

Il s'agit d'une nouvelle répartition des rôles: au père les dérapages verbaux, les discours racistes et d'exclusion (pour ménager la vieille garde), à la fille le vernis de respectabilité (pour conquérir de nouveaux électeurs). Notons qu'à l'UMP, on retrouve la même répartition des tâches entre un Xavier Bertrand et un Guéant p. ex.

Alors que Marine Le Pen prétend défendre les services publics (auxquels les Français restent attachés), sur des sites amis du FN on peut lire ceci : « un grand nettoyage par le fond de cette chienlit de fonctionnaires privilégiés, incapables et arrogants qui s'imaginent être au-dessus des lois et des règles ». Pendant le mouvement pour la défense des retraites, qui a mobilisé des centaines de milliers de manifestants et obtenu le soutien d'une très large majorité de nos concitoyens, elle a traité ceux qui luttaient «d'émeutiers». Pour lutter contre la dette, il faut «réduire les dépenses», donc évidemment couper dans les budgets sociaux et réduire encore le rôle protecteur de l'Etat, ou les dépenses des collectivités locales. Pas un mot sur les taux abusifs pratiqués par les banques privés. Le FN veut alléger le coût du travail, augmenter le temps de travail par des incitations salariales (bref, «travailler plus pour gagner plus») ; pas un mot sur la dégradation des conditions de travail. Bref, ces propositions aggraveront nos conditions de vie et de travail.

Par rapport aux syndicats, le FN préfère des corporations, moins revendicatives et plus facilement contrôlables. Sur ce point encore, Nicolas Sarkozy est très proche du parti lepéniste : «J'ai compris que les vrais blocages ne viennent pas du peuple français, mais de certains syndicats...» ; Corinne Lepage rappelle alors que «c'est comme ça qu'a commencé la montée des fascismes en Europe dans les années trente».

Quant aux femmes, on les renvoie à la maison avec un revenu parental ; on déremboursera l'IVG tout en s'en prenant au Planning Familial (donc restreignant l'accès à la contraception). Une nouvelle fois, les femmes seront doublement victimes d'un système oppressif.

Même si le discours a changé, le fond n'a pas changé : il reste le même, raciste, avec le mythe de «la France éternelle», le recours à une politique autoritaire. Sa prétendue défense de la laïcité est une façon de s'en prendre aux musulmans.

Marine Le Pen prétend traiter la question de l'immigration à travers des dossiers concrets (donc non plus comme l'obsession de son père) : l'économie, le logement, avec la même base de mensonges sur les « profiteurs », puisque les travailleurs immigrés cotisent aux différentes caisses, paient des impôts, bref ils contribuent positivement à l'économie française.

L'extrême-droite a toujours joué le rôle de chien de garde du capitalisme : Hitler, qui a été élu au départ, a pu tromper bien des Allemands, par la création d’emplois, en mettant en avant la défense du peuple et la sécurité : la suite est connue.

Le discours de l'extrême-droite flatte le peuple, mais dès qu'il est pouvoir, il défend le capitalisme qui le finance : il s'agit d'un masque.

Bref, le Front National nous prend pour des imbéciles !

Il défend l'emploi ? Mais dans les Bouches du Rhône il a voté contre une subvention au groupe Fralib (thé et infusions) pour maintenir l'emploi !

Il est boycotté par les médias ? Il passe autant sur les radios et à la télévision que les autres groupes politiques, et beaucoup plus que certains !

Il prétend ne pas pouvoir exposer son programme et ses idées, mais il passe son temps à se plaindre à propos des 500 signatures qu'il a bien sûr obtenues !

Il défend le peuple ? Mais quand le voit-on se mobiliser pour la justice sociale ?

Alors, chers concitoyens, si vous êtes en colère....

Il y a suffisamment de candidats aux présidentielles en France (8 : en-dehors du FN et de l'UMP) pour exprimer votre rejet du sarkozysme.

Mais s'occuper de la politique, ce n'est pas seulement voter tous les cinq ans, vous pouvez aussi agir :

en renforçant un syndicat

en allant demander des comptes à votre député lors de ses permanences: c'est lui qui vote les lois et les mesures qui nous concernent

en vous engageant dans une association qui renforce la solidarité

en militant dans un parti politique ou dans un collectif (contre la dette, contre le racisme, pour la défense des services publics...)

en participant à des discussions politiques avec vos collègues, vos amis, vos proches afin de démasquer l'extrême-droite

en imposant une politique sociale et l'égalité entre les citoyens, qui se soucie du bien-être de la population

La situation n'est pas désespérée : selon un récent sondage (janvier) 72 % des Français ne font pas confiance à Marine Le Pen pour exercer des responsabilités gouvernementales : allez, encore un effort !

Contre les discours de haine, contre les lendemains en «brun marine», organisons la démocratie ; contre le désespoir, le découragement, reconstruisons le vivre ensemble, la solidarité...

Le courage politique, ce n'est pas de se serrer la ceinture : le Conseil National de la Résistance a imposé la sécurité sociale, la retraite, la liberté de la presse après la seconde guerre mondiale, alors que la France était ruinée et exsangue... Alors, à nous de jouer, pour la justice et les libertés !

JLH.



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