Info
N°49 – novembre-décembre 2012
Bulletin de
Justice & Libertés
Comité de vigilance contre l’extrême droite et pour le
respect de l’Etat de Droit
Exclusion et rejet :
Valeurs
communes à
l’UMP et
au FN
Les efforts de Nicolas Sarkozy pour «extrême droitiser»
l’UMP ont-ils fini par aboutir ? En effet les indices de convergence
politique et idéologique se multiplient entre l’UMP et le FN.
Un
militant marseillais de l’UMP, partisan d’une «droite dure», estime que
dans son département «il n’y a qu’un «petit pont» entre l’UMP
et le FN»(1). «Petit pont» ou «boulevard»,
nous allons confronter les propos et réactions des représentants (élus ou non)
de l’UMP et du FN, exprimés ou observés à propos de différentes questions de
société.
Commençons
par les «centres éducatifs fermés» (CEF). Les CEF, créés par une loi
Perben de 2002, sont de petites structures qui accueillent 10 à 12 mineurs
récidivistes de 13 à 18 ans, encadrés par une vingtaine d’éducateurs, pour six
mois, renouvelables une fois. Le contrôleur général des lieux de privation de
libertés s’était inquiété, le 1er décembre 2010, du «recours
abusif, parfois usuel, des moyens de contraintes physiques» envers ceux qui
restent «des enfants en difficulté.»(2)
Pas d’espace
public pour les
agités «identitaires» (suite,
page 3)
Voici
l’état des lieux du CEF de Savigny-sur-Orge (Essonne) : «la
situation dramatique de cette structure après sept mois d’observation. Tout est
sale, dégradé et délabré» écrit la directrice du CEF. «Les mineurs
mangent directement dans le plat par manque de vaisselle (…) Ma mission
devient très difficile, sinon impossible.»
Voici
quelques réactions-prises de position- presque identiques de la droite et
l’extrême droite aux propositions de la garde des sceaux. «Mme Taubira
défend une vision idéologique, passéiste et naïve d’une justice qui refuse
toute place à la sanction » (Eric Ciotti, secrétaire national de l’UMP
à la sécurité). La ministre mène une politique caractérisée par «une
fascination envers le délinquant criminel» (Wallerand de Saint-Just- Front
national).
Primer
le répressif sur l’éducatif- qualifié par Eric Ciotti ou
Wallerand de Saint-Just «vision idéologique, passéiste, naïve» ou «fascination
envers le délinquant criminel»- constitue la culture sécuritaire commune à
l’UMP et au Front National.
«L’Aide
médicale de l’Etat» (AME) constitue un autre champ de convergence UMP-FN.
Le FN vise ni plus ni moins à supprimer ce dispositif destiné à prendre en
charge les dépenses médicales des étrangers sans ressources en situation
irrégulière(3). Le FN, lui, voit dans ce dispositif «un appel
d’air à l’immigration clandestine, alimentant les réseaux mafieux.»(3)
A
son tour, président du groupe UMP à l’Assemblée Nationale, Christian Jacob a
annoncé que les députés UMP seraient «très offensifs» sur l’AME.
Dominique Tian, (UMP, Bouches-du-Rhône) dénonce l’AME, dans les mêmes termes
que le FN : le «tourisme médical» qui alimente «des filières
mafieuses» (3). Une position basée sur «l’exclusion et
l’affrontement» et dénoncée par Marisol Touraine, ministre des
affaires sociales.
Patrick
Roger, journaliste au quotidien Le Monde, relève à juste titre que «sur
certains thèmes, les mots de députés de droite rejoignent ceux de l’extrême
droite. Les deux élus du FN se sentent alors peut-être un peu moins seuls.»(3)
En effet, le débat sur la suppression du «droit de timbre» pour l’accès
à l’AME accordée aux étrangers sans ressources en situation irrégulière, a
offert l’occasion aux deux députés du FN, Marion Maréchal-Le Pen (Vaucluse) et
Gilbert Collard (Gard) de descendre du dernier rang pour venir s’assoir à côté
de leurs collègues de l’UMP, parmi lesquels ils se sont fondus(4).
La
convergence entre l’UMP et le FN s’observe également sur la rafle du Vél’d’Hiv.
Dimanche 22 juillet, au square des Martyres juifs, sur les lieux mêmes de
l’ancien Vélodrome d’hiver, quai de Grenelle à Paris, le président de la
République, François Hollande a rappelé, d’une part, que «la vérité,
c’est que le crime fut commis en France, par la France», et d’autre part
que : «pas un soldat allemand, pas un seul, ne fut mobilisé pour
l’ensemble de cette opération.»
La
réaction de l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, n’a
pas tardé à venir. Il se dit «scandalisé» par les propos de François
Hollande sur la rafle du Vél’d’Hiv. Selon lui « …la France n’a rien
avoir avec cela». Il faut rappeler que le Conseil représentatif des
institutions juives de France (CRIF) dénonce les propos de M. Guaino (5).
Qu’en pense Florian Philippot, l’un des vice-présidents du FN ? Selon lui,
«il faut cesser de culpabiliser les Français»(7). Henri
Guaino et Florian Philippot n’ont pas été démentis par leurs partis et nous
estimons qu’ils parlaient au nom de leurs organisations respectives.
Un
observateur averti ne trouve aucune différence entre la position de l’UMP et du
FN sur la rafle du Vél’d’Hiv.
Ce
n’est plus un secret pour personne que le rejet de l’étranger ou du Français
d’origine étrangère est la marque de fabrique de l’UMP et du FN. Tout le monde
se souvient encore d’Amine, militant d’origine maghrébine de l’UMP, participant
à l’Université d’été 2009 de son parti. Alors ministre de l’intérieur, Brice
Hortefeux avait tenu des propos racistes sur Amine: «quand il y en a
un, ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes… ».
Sous
Sarkozy, l’immigré était la cible favorite et permanente des ministres UMP et
du FN. Par exemple, pour lutter contre la «fraude sociale», Claude
Guéant, alors ministre de l’intérieur, ciblait les étrangers. Il avait annoncé
la «connexion», dès le 1er janvier 2012, «des fichiers des
étrangers résidents en France et des fichiers de Sécurité sociale»(8).
Selon les journalistes du quotidien Le Monde qui ont rédigé l’article,
«l’annonce de M.Guéant s’inscrit dans la droite ligne des thèmes de campagne de
l’UMP. Elle reprend aussi un sujet défendu par le candidate du FN à l’élection
présidentielle, Marine Le Pen.»(8)
Or,
la fraude fiscale des allocataires-Français et étrangers confondus- estimée par
la Cour des comptes à environ 3 milliards d’euros par an, ne pèse rien face à
la fraude fiscale des entreprises et des ménages aisés, qui s’élève, quant à
elle, à 45 milliards d’euros (9). L’évasion fiscale s’élève à 50
milliards d’euros (12) et l’équivalent de dix fois la richesse de la
France est caché dans les paradis fiscaux (13).
Imitant
Marine Le Pen, Claude Guéant va jusqu’à dire que «la France accueille «trop»
d’étrangers en situation régulière»(10).
Durant
le quinquennat Sarkozy, pour exprimer leurs idées, l’UMP et le FN utilisaient
le même langage : coût du travail et non salaire, «charges
sociales et non cotisations, assistanat et non droits sociaux, libéralisme et
non capitalisme, Etat-providence et non Etat social de droit». (11)
Les
dirigeants de l’UMP ont-ils bien reçu le message que les Français leur ont
envoyé à l’occasion des élections présidentielles et législatives 2012 ?
Critiquant le «ni, ni»-ni alliance électorale avec le PS ni avec le FN- imposé
lors des dernières législatives par l’UMP, François Baroin, l’ancien ministre
de l’économie a dit : «on a perdu les municipales, les régionales
les cantonales, les sénatoriales, la présidentielles, les législatives, il faut
tirer les enseignements de tout ça»(14)
Pour
l’ancien ministre, si 21 députés de la Droite populaire ont été battus aux
dernières législatives, c’est la preuve que «l’opinion n’approuve pas»
la course derrière le FN.
Mais,
l’UMP est parcourue de courants divergents. Lionnel Luca, cofondateur de la «Droite
populaire», fait une autre lecture
de l’échec des députés de son collectif. «Ce n’est pas la droitisation du
discours qui fait perdre l’UMP, c’est le manque de droitisation des actes (…)
Les gens attendaient le «Kärcher», ils ne l’ont pas eu… Du coup on a le vote FN.»(14)
Il
y a du travail à l’UMP. Saura-t-elle revenir au bercail républicain ou continuera-t-elle
à courir derrière le FN ? Le «collectif de la Droite populaire» et
les «amis de Nicolas Sarkozy», association conduite par des Brice
Hortefeux et des Nadine Morano, représentent un important courant situé à la
droite extrême de l’UMP. Les républicains arriveront-ils un jour à se faire
entendre ? Un sombre avenir attend l’UMP.
A.R.
Pas d’espace public pour les
agités «identitaires»
"Les
lois de la physique politique sont tellement prévisibles: quand une partie de
l'UMP, regroupée autour de Copé, mais avec une "résistance" de plus
en plus molle de Fillon, reprend à son compte les vieilles lunes racistes et l
es bobards véhiculées depuis des décennies par le FN, donnant à ce dernier un
vernis de crédibilité, elle ouvre un boulevard à la droite de cette droite
extrême, notamment avec les agités "identitaires": occupation du
minaret de la mosquée de Poitiers, pétitions en ligne pour l'expulsion des
clandestins, "jeune Bretagne" qui appelle à manifester devant un
squat, convention identitaire annoncée à Orange le 29 octobre grâce à la
bienveillance de Bompard... Il est plus que temps que tous les démocrates,
celles et ceux qui ne veulent pas de ce climat d'intolérance brutale se
manifestent avec nous. Pas d'espace public pour les fachos !" JLH
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